Le chèque de garantie au Maroc. Que dit la loi ?

Qui d’entre vous n’a pas été confronté un jour à produire un chèque de «garantie» aux portes d’une clinique? Sans cette garantie, impossible d’être admis ou pris en charge. Et tant pis pour le serment d’Hippocrate. A la décharge des cliniques, c’est souvent aussi le seul moyen qu’ils ont pour sécuriser le paiement de leurs prestations.

 

Ces établissements n’ont pas l’apanage de cette pratique. Du petit magasin de vêtements branchés aux parfumeries, agences de location de voiture, jusqu’aux boutiques du célèbre marché de Derb Ghallef à Casablanca, payer par chèque de garantie est monnaie courante. Malgré qu’il soit formellement interdit par la loi, régler par chèque de «garantie» est une tradition bien établie dans les transactions commerciales, relève  Me Abdelatif Laamrani, avocat au barreau de Casablanca. Avant que le régulateur ne serre la vis, pour régler leur prime d’assurance automobile chez le courtier, de nombreux clients remettaient plusieurs chèques post-datés qui couvrent les différentes échéances de l’année. Bref, ce moyen de paiement est omniprésent dans tous les secteurs.

Pourtant, la notion du chèque de garantie n’existe pas en droit marocain,  met en garde Me Laamrani. Le chèque est un moyen de paiement à vue et peut être encaissé immédiatement, même s’il est post-daté. L’émetteur est censé disposer de la provision sur son compte bancaire.

Sur le plan juridique, la loi sanctionne sévèrement celui qui émet ou celui qui accepte un chèque de garantie. L’alinéa 6 de l’article 316 du code de commerce est très clair: «Est punie d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 2.000 à 10.000 dirhams, sans que cette amende puisse être inférieure à 25% du montant du chèque,  toute personne, en connaissance de cause, accepte de recevoir ou d’endosser un chèque à la condition qu’il ne soit pas encaissé immédiatement et qu’il soit conservé à titre de garantie». Ici, la sanction cible uniquement le bénéficiaire.

Par ailleurs, le débiteur doit en principe respecter ses engagements au risque de s’exposer à des sanctions pénales. Le chèque de «garantie», présenté à l’encaissement avant la date négociée, revient généralement impayé pour provision insuffisante. L’émetteur peut se retrouver dans une situation embarrassante. Pour cela, le code pénal a sanctionné des mêmes peines toute personne qui  émet ou accepte de recevoir un chèque émis tout en sachant qu’il n’est pas provisionné. Le code pénal évoque implicitement le chèque «de garantie» dans son article 544: «Est puni des peines édictées à l’alinéa premier de l’article 540 (un à cinq ans de prison), et une amende de 500 à 5.000 DH, quiconque émet ou accepte un chèque à la condition qu’il ne soit pas encaissé immédiatement mais conservé à titre de garantie».

Une nouvelle réforme? La loi marocaine est-elle un obstacle à la prolifération de cette pratique? En droit français, émettre ou accepter un chèque n’est pas considéré comme un délit. C’est le même cas pour le droit anglo-saxon.

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